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Anecdotes de prepa

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Ah, la prépa. Que des bons souvenirs !

Le premier cours. Le tout premier cours. Des maths, bien sûr. « Rappels sur les fonctions usuelles ». Au bout de trois quarts d'heures, tous dans la salle se posaient la même question : « en quoi diable est-ce un rappel ? ». Si c'est pas tordant, ça, hein ?

Et les cours du Samedi après-midi ! Ah, les sept/huit heures de maths, un Samedi sur deux, seulement séparées par une pause sandwich-belote ! Le lycée pour nous tous seuls ! Quels bons moments…

Et le piano ! Ah, le piano. Dans cette salle de musique de cinq mètres carrés, ce piano accordé pour la dernière fois au temps d'Albinoni. Les touches en étaient pour moitié enfoncées. Ce piano légendaire sur lequel moi et le major de notre promo nous défoulâmes un Mercredi après-midi, Mercredi fatal à compter duquel la salle ne fut plus jamais ouverte. Ah…

Et puis très vite, les khôlles ont commencé. Ah, les khôlles, ces bonnes vieilles khôlles. Une khôlle, pour ceux qui sont étrangers à ce monde à part et ô combien enchanteur, c'est une session notée de passage au tableau avec un prof. En tête à tête ou presque. Comme les oraux des concours. À ceci près que nous passions par trinômes, faute d'horaires disponibles dans les emplois du temps surchargés…

Étant au nombre de quarante-sept dans la promo de première année, j'eus la chance d'être en binôme, ce qui laissait place à des jeux folâtres, notamment « le troisième tableau est à celui qui remplit le sien le plus vite ». J'eus toutefois la malchance d'être en duo avec le major de notre promo, donc il gagnait presque toujours. À Saint-Louis, nous avions même un couloir dédié aux salles dans lesquelles se déroulaient ces moments exquis d'intimité professorale, sobrement nommé « le Couloir de la Mort ». Dans ce couloir fort bien nommé, l'on voyait gésir moult corps désarticulés, mollement affalés sur un texte à commenter pour une séance d'Anglais ou sans espoir sur le cours de sciences sur lequel ils allaient passer.

Comble de la joie, les individus qui nous faisaient passer ces khôlles merveilleuses balayaient un large éventail d'individus et dont je pourrais avec toi deviser tout le jour et davantage. Ne citons de ceux-là que quelques exemples frappants, à commencer par le déjanté qui, lors de notre première khôlle, nous offrit des exercices proposés aux oraux de Polytechnique (l'X elle-même) avant de s'en aller une demie-heure, nous laissant démunis et esbaudis sur nos énoncés. Et que dire de celle qui passait son temps à répéter « Je suis examinatrice aux Mines » et qui lâchait à l'occasion quelque désobligeant commentaire tel que « j'ai ouvert la fenêtre parce que vous revenez du sport » ou « votre pull est dégueulasse » ? Et tant d'autres encore ! Dame Chrono ! Sire Texte-A-Trous ! Seigneur Une-Heure-de-Retard ! sans oublier le jeune Un-Juron-Par-Seconde, dépassé en compétence par un bon quart de la promo ! et l'Eternel Blasé ! Ah…

Ah, la prépa.

Levé — avant d'être éveillé — à six heures du matin, de retour en ma demeure à dix-huit heures pour trois heures de travail : les soixante heures hebdo ! Et ces fêtes de Noël. Levé à sept heures les vingt-quatre et vingt-cinq Décembre pour faire des maths jusqu'au soir. Le gigantesque trieur rempli à en craquer d'énoncés d'exercices — en police de taille 10, sans indices ni corrections. Moi qui étais une innocente racaille fainéante du 93, l'incarnation même de la passivité, la quintessence de la paresse… Ah…

Ah, les vingt pages d'exercices de maths que l'on nous donna avant les vacances d'été… lesquelles furent corrigées dans les premiers jours de la rentrée en deuxième année. Cette deuxième année en MP* — « étoile » pour distinguer avec arrogance et mépris les « meilleurs » des « autres » — fut d'ailleurs plus enchanteresse encore. L'esprit « concours » se trouvait davantage renforcé, la pression augmentée. « Vous êtes là pour intégrer Polytechnique ou ENS », nous disait-on. Et les camarades n'étaient pas en reste : « Alors, tu passes quoi comme concours ? X, ENS et pis c'est tout ? ». Et leur déception quand tu leur répondais que tu ne présentais même pas ces concours ! « Quoi ?! Mais pourquoi ? ». Ah… cette expression sur leurs visages, cette profonde et désopilante déconfiture…

Mais j'oubliais ! L'une des disciplines les plus enchanteresses de l'histoire de l'éducation : le Français-Philosophie [cinquième de Ludwig, siouplaît]. Quels merveilleux ouvrages nous dûmes lire. Les divagations hallucinatoires, libidineuses et sadomasochistes d'un homme mentalement dérangé. Les questionnements philosophico-religieux d'un antique illuminé des plus hilarants.  Discipline grisante pendant laquelle nous organisions quelques parties improvisées de « Des Chiffres et des Lettres ». Ah, « les énigmes du moi », tournées en ridicule par les récitations de quelques camarades, dans une salle obscure, un soir de veille de vacances. Que de fous rires, en cette lointaine soirée…

Et Nathan ! Notre humoriste désigné, qui, pris en flagrant délit d'absence spirituelle par la prof de Français, parvenait à répliquer par le biais d'une hilarante ineptie qui, malgré tout, allait dans le sens du cours, laissant l'enseignante interdite et bafouillante ! En deuxième année, tandis que la prof de Physique admirative d'un quelconque savant mort et enterré nous disait « Je sais pas comment il faisait avec les outils de l'époque pour faire ses démonstrations et tout ça, hein… », Nathan de rétorquer : « Ben lui, il savait ce qu'il faisait, contrairement à nous ». L'autre en est restée bleue !

Mention spéciale aux TIPE — Travaux d'Initiative Personnelle Encadrés qui devaient, en première année, faire l'objet d'une présentation de deux heures devant toute la classe au terme d'un travail de recherche, calculs et mise en page titanesque. Ah, l'apprentissage obligé de LaTeX en plus du reste…

Et les manuscrits illisibles que nous reçûmes à la fin de cette même première année ? Dix chapitres complets que nous n'avions pu étudier en cours ! Dix chapitres des plus ardus à saisir, en pattes de mouches, passés par une photocopieuse fatiguée ! Ah, que n'eussions-nous point eu ces fameux cours du Samedi après-midi, pour profiter davantage de la béate jouissance que nous procurèrent ces écrits…

Et tant d'autres choses encore ! Le prof d'informatique, si bon dans son domaine qu'il était incapable d'envisager que nous ne comprenions pas ! La première khôlle de physique de deuxième année, portant sur une partie de cours que nous n'avions pas vu, faute de temps ! Les citations géniales des professeurs, notées sur un coin de page de cours !

Ah, la prépa… cette époque où je prenais une heure chaque dimanche matin pour rédiger quelques pages d'un roman que j'avais entamé dans mon enfance, avec le sentiment profond de manquer à mes devoirs les plus sacrés et de commettre un sacrilège inénarrable… Cette époque où mon ordinateur, havre de satisfaction depuis ma tendre enfance, prenait des allures de récompense utopique…

Ah…



Pas fâché que ce soit fini.
Voilà — ou « voici » pour ceux qui liraient la description avant le texte — le contenu d'un e-mail que j'ai envoyé voilà un ou deux ans à un individu qui me demandait comment s'étaient passées mes deux années de prépa.

Remerciements à :iconblandinepl: qui m'a remémoré la chose. Ça ressemble plus à une page de journal qu'à un texte de littérature à proprement parler, mais faut bien démythifier un peu tout ça ^^

Edit : petit recueil de blagues, boutades et private jokes de ce temps-là : [link]


No English translation here, friends.

Ninguna traducción Española aquí, amigos.
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ptitjo's avatar
Ce sont les années les plus traumatisantes qui laissent les meilleurs souvenirs ^^